11 Déc La Porte de l’initiation à Thornhill
Les 27 et 29 octobre dernier et le 4 novembre dernier, à Thornhill, la compagnie de production TQuest a terminé de donner deux représentations, la première canadienne, du drame mystère de Rudolf Steiner La Porte de l’initiation. Les deux représentations ont été données à guichet fermé.
Pour beaucoup des membres de la troupe, il s’agissait de l’aboutissement d’une collaboration intense de trois années passées à essayer de faire vivre sur scène le texte de Rudolf Steiner. Les paroles du texte représentent sous forme dramatique le cheminement ésotérique des protagonistes et mettent sur scène aussi des êtres suprasensibles, dont Lucifer, Ahriman, des esprits de la nature et les forces de l’âme.
La première canadienne de la représentation intégrale de « La Porte de l’initiation » a attiré un public très diversifié; quelques-uns venaient tout juste d’en entendre parler par des amis; d’autres étaient des anthroposophes de longue date. D’après mes conversations avec des gens venus sans aucune connaissance préalable de l’anthroposophie, le fait de ne pas connaître l’anthroposophie ne semblait pas gêner leur appréciation du drame.
Après la fête de clôture, l’acteur Paul Hodgkins a dit avoir parlé avec une femme qui l’avait croisé par hasard durant la pause sans se rendre compte qu’il faisait partie de la distribution. Et Susan Richard, qui a tenu le rôle de Maria, s’est fait demander par quelqu’un si elle faisait partie de l’équipe des cuisiniers qui avaient préparé le délicieux repas! Est-ce que cela voulait dire que pendant le déroulement sur scène, les acteurs ont été transcendés par les archétypes des personnages qu’ils interprétaient?
D’autres acteurs ont affirmé durant la fête qu’ils avaient pu jouer leurs rôles comme ils l’ont fait grâce à l’espace que les autres acteurs avaient préparé et créé pour eux. On a aussi évoqué les crises de dernière minute qui ont été réglées à toute vitesse en coulisse. Quelques-uns des acteurs ont vécu des moments décisifs au cours du processus, comme par exemple le moment éclair où il leur est devenu soudain possible de réciter de mémoire les répliques du texte.
Et encore combien de représentations?…..
Je me souviens d’une remarque de Werner Glas selon laquelle les acteurs professionnels sentaient qu’une pièce de théâtre n’était pas vraiment prête avant qu’ils ne l’aient jouée soixante-dix fois. Mais lorsqu’on songe à comment notre pièce avait connu, chaque semaine pendant trois ans, des répétitions sous plusieurs formes, alors on peut probablement compter plus d’une centaine de répétitions, même en considérant les vacances d’été. Indéniablement, la quantité d’énergie et de force de volonté que cela représentait, de la part de tous, travaillant ensemble, a attiré parmi nous une présence spirituelle qui n’était pas présente au début.
J’ai eu le net sentiment que toute la production était enveloppée d’une ambiance d’une « fête d’un ordre cosmique ». Tout le dévouement, tout le sacrifice qui avaient été manifestés durant ces trois années de préparation avaient contribué à bâtir une sorte de substance spirituelle-morale qui a attiré la grâce du monde de l’esprit; et ceci est devenu palpable pour les spectateurs. J’avais déjà ressenti la même chose l’année dernière lors des répétitions générales. Le groupe semblait constituer une véritable communauté ésotérique dans sa manière de travailler ensemble.
Voisins et amis
J’avais déjà ressenti lors de notre représentation de l’année dernière de quelques extraits du drame que ce que je vivais ici à Thornhill avec cette troupe d’amateurs me touchait au plus profond de mon être. J’avais assisté, en 2014, à la représentation du cycle complet des quatre drames-mystères, une expérience exceptionnelle en effet. Mais je ne savais pas au juste pourquoi cette production à Thornhill m’a touché d’une manière toute particulière.
Je me suis creusé les méninges pour essayer de découvrir pourquoi. Une chose qui m’est venue à l’esprit, c’est que le fait de voir jouer ce drame-mystère par des voisins et amis de tous les jours constituait en soi un véritable drame mystère, pourvu que l’on l’envisage avec l’attitude d’âme qui convient.
Ce serait un échec si ……
En 2014, Barbara Renold, qui avait assuré la mise en scène des drames-mystères, a dit au public venu assister aux quatre drames (c’était la première fois que l’on présentait le cycle entier en Amérique du Nord) que si cette production n’inspirait pas d’autres à entreprendre un travail avec les drames-mystères, qu’elle considérerait avoir échoué dans son effort.
Il était donc tout à fait juste que Barbara ait pu faire partie du congrès Polarities Conference qui a accompagné notre représentation du drame-mystère en octobre. Elle a pu ainsi constater personnellement les fruits de ce que sa production de 2014 avait inspiré. Il va sans dire que Barbara a fait partie de cette initiative dès le début, étant venue animer un congrès préparatoire en 2015.
Le directeur du projet, Timothy Nadelle, a annoncé suivant la dernière représentation en novembre que son travail (et celui de Magi Nadelle) avec les drames-mystères entrerait pour le moment dans un état de « prayala » (tel l’état de sommeil cosmique entre les différentes incarnations planétaires). Magi a assumé la mise en scène pendant les trois années. Entre-temps, Timothy entreprendra un nouveau projet de travail de proximité auprès de détenus en Ontario. Et qui sait, peut-être à un moment futur, quelqu’un reprendra le flambeau pour entreprendre ici au Canada un travail sur les trois autres drames-mystères du cycle.
Le projet pour monter « La Porte de l’initiation » a été subvenu par la Société anthroposophique au Canada et le Groupe de Thornhill.
— Richard Chomko
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