11 Déc Martin Driehuyzen est décédé à White Rock (C.-B.) le 9 novembre 2017.
Membre de longue date de la Société anthroposophique et de la Communauté des Chrétiens, Martin était un pilier de la communauté à Vancouver. Sa taille impressionnante et son port distingué ont fait de lui l’individu tout indiqué pour tenir le rôle de Dieu le Père dans le Jeu du Paradis (des Jeux de Noël d’Oberufer). Il a également joué le rôle de Balthasar dans le jeu des Rois Mages. Grâce à sa bonne humeur et sa compassion, on lui faisait souvent endosser le rôle de Saint Nicholas lors de ses visites annuelles à l’école Waldorf.
Martin est né en 1933 à Zandvoort, petite ville des Pays-Bas. Il a grandi près des côtes orageuses de la Mer du Nord avec ses dunes impressionnantes et ses plages sans fin. Il n’avait que trois ans lorsque son père est mort; Martin en a vécu le deuil pendant toute sa vie. Sa mère, alors sans aucune source de revenus, a amené ses trois enfants en Allemagne pour vivre avec sa mère à elle (cette dernière recevait une pension minime). Un jour, lors d’une promenade avec sa grand-mère, Martin a aperçu un jeune homme qui promenait un joli petit chien et s’est écrié : « Je voudrais tellement avoir un papa avec un chien comme ça! »
La jeune famille a fini par rentrer à Zandvoort. Lors de l’invasion allemande de la Hollande en 1940, on considérait les Allemands comme étant des ennemis. Cela a créé de la confusion dans l’esprit du jeune garçon, qui avait de l’affection pour tous ses proches, dont certains étaient de nationalité allemande. Comme la grand-mère n’avait pas le droit à sa pension si elle continuait à vivre en Hollande, maintenant que les deux pays étaient en guerre, la famille a dû se déplacer pour s’établir encore une fois en Allemagne, cette fois-ci dans le sud du pays, dans un village rural en Bavière, où les fermiers coupaient encore les herbes luxuriantes de leurs champs à la faux. Cette période de son enfance s’est avérée riche en expériences. À la fin de la guerre, lorsqu’il avait douze ans, la famille a été rapatriée en Hollande, où ils ont été confrontés à la destruction qu’avaient produite dans leur ville natale les bombardements allemands.
Lorsque sa mère, qui était anthroposophe, a constaté combien Martin était malheureux à l’école publique locale, elle a décidé de l’envoyer à l’école Waldorf d’Amsterdam. Cela a été un moment marquant de sa vie, car il y a trouvé des professeurs qui le comprenaient parfaitement et envers lesquels il n’a jamais cessé d’exprimer sa reconnaissance. En effet, Martin a soutenu durant toute sa vie avec dévouement le mouvement Waldorf.
Lorsqu’il était en neuvième année, Martin est allé jusqu’au Goethéanum en auto-stop où l’on représentait sur scène le Faust de Goethe. Les nombreuses séances auxquelles il a assisté ont laissé sur lui une impression indélébile. Ayant terminé l’école secondaire, il s’est inscrit à une école d’agriculture biodynamique, le Warmenderhof, où il a compris que l’agriculture serait l’intérêt central de sa vie.
Le destin l’a amené éventuellement au Canada, arrivant à Halifax et voyageant en train jusqu’à Vancouver. Il a été étonné par le panorama du vaste paysage – forêts, lacs, rivières, collines, montagnes à n’en plus finir. Il arrivait de Hollande, pays plat et cultivé comme un jardin bien rangé – en somme, étouffant! Il adorait le fait de se trouver dans ce nouveau pays qui était vaste et libre et sauvage!
Il s’est fait engager sur une ferme à Nanoose Bay sur l’île de Vancouver où on lui a donné un lit dans un poulailler! Son frère est venu le rejoindre au Canada et les deux ont trouvé du travail dans les champs de pétrole de l’Alberta.
Ayant besoin de se former officiellement, Martin s’est inscrit à la faculté d’agriculture à l’University of British Columbia en 1955. Sa vie consistait maintenant de cours, de laboratoires, d’études et de recherche. Mais il trouvait quand même du temps pour se faire une vie sociale – la danse sociale, le bridge, le ski. Quelques-uns de ses cours lui donnaient du fil à retordre, notamment le cours d’anglais 101. Mais il se trouvait dans la classe un rayon de lumière du nom de Riet, une Hollandaise qui faisait rire tout le monde avec sa désinvolture et son charme féminin. Et, bien sûr, le reste appartient à l’histoire; Martin et Riet se sont mariés et ont eu trois enfants : Anna, Michael et Sacha.
Grâce à ses études universitaires, Martin a entamé une carrière de 27 ans au sein du ministère de l’agriculture de la Colombie-Britannique comme spécialiste dans la gestion de l’eau et des sols.
Ayant trois jeunes enfants, Martin et Riet ont été fort actifs dans les efforts de mettre sur pied l’école Waldorf à Vancouver, bien que leurs propres enfants soient encore trop jeunes pour la fréquenter. Martin a travaillé activement au conseil d’administration pendant de nombreuses années, aidant dans la collecte de fonds et participant au déménagement de l’école à son site permanent.
Lors de la fondation de la Communauté des Chrétiens à Vancouver, Martin et Riet sont devenus membres de la communauté et ont toujours participé régulièrement aux offices. Ils ont également assisté aux groupes d’études et aux conférences offertes par la Société anthroposophique jusqu’à l’époque où, étant plus âgés, les déplacements dus à la distance sont devenus trop ardus. Une autre de source d’inspiration pour Martin et Riet a été Cascadia, organisation membre du mouvement Camphill. Ils y allaient lorsqu’ils le pouvaient pour assister aux manifestations artistiques et sociales.
À sa retraite de la fonction publique, Martin et Riet ont cédé à leur envie brûlante de voir le monde. Ils se sont acheté une Euro-Van pour explorer les Balkans, les côtes de la Mer Noire, la Grèce, la Turquie. Et après avoir fait transporter le véhicule au Canada, ils ont sillonné ce vaste continent et ont descendu la côte ouest jusqu’au Mexique.
Tout au long de sa dernière année de vie, Martin a maintenu sa bonne humeur et son optimisme, bien que de sérieux problèmes de santé l’empêchaient de se déplacer facilement à pied.
Les gens qui travaillent en soins palliatifs disent souvent que nous mourons à peu près de la même manière que nous avons vécu, et dans le cas de Martin c’était vrai. Les professionnels de la santé et les autres patients qui le côtoyaient appréciaient son attitude affable et positive et son vif sens de l’humour. Bien que dans un état de grande faiblesse, il a gardé sa présence d’esprit jusqu’à la fin, étant préparé intérieurement à traverser le seuil.
Les funérailles de Martin ont eu lieu le 11 novembre (la Saint-Martin) dans les locaux de la Communauté des Chrétiens. L’église était remplie de parents et amis. Il y a eu du chant, un accompagnement de violon et de violoncelle pendant l’office. Ensuite, nous sommes tous allés célébrer cette longue vie, si riche, qui avait tant donné à tant de gens.
Nous autres, membres de la communauté de Vancouver, sont pleins de reconnaissance. Martin a fait partie de notre vie pendant toutes ces années, et nous osons croire qu’il continuera de nous envoyer sa bénédiction à partir de l’au-delà.
Susan Koppersmith, avec la collaboration d’Anna Driehuyzen
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