06 Sep Lettre de Arie van Ameringen – Septembre 2011
Chers Amis
A l’approche de la Michaëlie, nous pouvons nous demander quel geste, quelle action nous pouvons faire de façon plus consciente pour le monde qui nous environne. Les évènements qui se sont déroulés depuis quelques mois sur les différents continents, de l’Angleterre à la Syrie, de l’Afrique du Nord à la Norvège, de l’Amérique du Nord à la Somalie, nous interpellent d’ une façon ou d’une autre.
En route vers la Russie – où notre groupe d’ISIS va rencontrer des initiatives anthroposophiques et y offrir des ateliers, je me suis arrêté à Francfort. En parcourant la ville, je me suis adonné à lire une carte postale sur laquelle il y avait un extrait d’un poème de Goethe que j’avais appris à l’école. Le début se lit comme suit:
Edel sei der Mensch,
hilfreich und gut
Denn dass allein
unterscheidet ihn
von allen Wesen
die wir kennen
Et qui peut se traduire par:
“Que l’être humain soit noble, dans l’entraide et bon.
C’est par ces seules qualités qu’il se distingue de
tous les autres êtres vivants que nous connaissons.”
Cette distinction par rapport aux autres êtres vivants est présentée comme un souhait, un idéal. Les trois qualités mentionnées pourraient être décrites comme: a) de la noblesse d’âme, du respect pour les valeurs humaines; b) une générosité dans l’entraide et c) une tolérance et un comportement pacifique envers ses semblables. Le poème profondément humaniste nous parle aussi du monde spirituel que nous pouvons pressentir. Plus loin, Goethe décrit comment l’action morale est tributaire des choix que l’on fait et des buts que l’on poursuit.
Que pouvons-nous faire comme gestes, comme actions qui aillent dans le sens de l’idéal du poème de Goethe?
Les récents événements dans le monde témoignent de situations économiques et sociales difficiles. Les comportements sont loin des idéaux tels que souhaités par Goethe. En Angleterre, ces hordes de jeunes ont agi avec une violence destructrice inégalée. En Syrie, la répression sans merci des dirigeants a dépassé largement les limites du respect et de l’intégrité humaine. Les agissements d’un Norvégien reflètent des pensées d’intolérance ethniques et religieuses.
Un des hommes les plus riches des États-Unis, Warren Buffet, dans une entrevue récente dénonçait les comportements égoïstes de ses richissimes collègues. Dans un article paru dans le Boston Globe en juin ou on y parlait de la situation économique difficile, on mentionnait que le nombre d’enfants américains sous-alimentés qui se présentait aux urgences dans les hôpitaux, avait doublé depuis deux ans. Et on peut facilement trouver d’autres exemples dans le même sens.
Dans le chapitre 9 de la Philosophie de la liberté, Rudolf Steiner, dans la perspective d’un acte moral libre, développe les différentes raisons qui nous poussent à agir en faisant référence au lien entre le motif et le pouvoir d’impulsion (dans ce dernier cas, il s’agit d’une force qui nous met en action – Triebfeder en allemand). Le motif correspond, pour sa part, au concept ou à l’image mentale que nous avons d’une action. Le pouvoir d’impulsion peut être conditionné par notre disposition caractérielle, par l’éducation, les valeurs ou encore les lois de la société. Ainsi, si une personne se brosse les dents tous les jours les raisons, le pouvoir d’impulsion peut être très différent d’une personne à l’autre. Dans un cas, ça peut être pour des raisons esthétiques, dans un autre cas ça peut être parce que les parents ont insisté sur l’importance de l’hygiène.
Lorsque nous exécutons une action ‘automatique’, nous agissons directement en raison d’une perception de nos sens inférieurs (instinct) ou d’un comportement social de convention (tact). À un niveau supérieur, nous pouvons être appelés à cause de nos sentiments (pitié, compassion etc.).
Un pouvoir d’impulsion plus élevé est produit par la pensée, par la réflexion Le plus élevé est celui qui nous vient de l’intuition, dans la mesure où cette action est libre de toute contrainte extérieure (sociale) ou individuelle (caractère). Notre action est alors régie par un contenu purement spirituel, elle est issue directement du monde idéel. Nous agissons par amour pour l’acte en soi. Nous agissons alors vraiment librement. Nos actes, dans la vie de tous les jours, peuvent être motivés par des mobiles différents. Nous sommes plus ou moins libres selon les circonstances.
Les qualités que Goethe nous présente sont absolument nécessaires pour notre humanité et nous devons poursuivre sur ce chemin. Une petite action dans ce sens n’est jamais de trop. Mais dans le progrès d’une action morale libre, il est bon de se demander pour quelle raison on agit de telle ou telle façon. Déjà prendre conscience de nos motifs d’action et des raisons de notre pouvoir d’impulsion, est une voie de transformation intérieure que nous pouvons aussi identifier comme une action michaëlique. Les exercices proposés par Rudolf Steiner pour travailler la volonté peuvent aussi contribuer à cette voie. Nos actions en deviendront ainsi plus éclairées et significatives pour nous-mêmes comme pour l’humanité.
Arie van Ameringen
Secrétaire général
août 2011, Irkuts, Sibérie
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